80% de l'électricité française est actuellement produite par 18 centrales nucléaires vieillissantes qui totalisent 56 réacteurs dont 5 sont actuellement à l'arrêt en plein hiver.
Que propose l'AEC (Avenir en commun) ?
Il propose de viser le 100% d'énergies renouvelables en 2050 et d'organiser la rénovation énergétique.
Il se propose également de sortir du nucléaire et d'abandonner les projets d'EPR, de planifier le démantèlement, la réhabilitation et la reconversion des sites nucléaires et de l'ensemble de leur bassin de vie.
De favoriser partout sur le territoire le recours aux diverses sources d'énergie les plus adaptées aux conditions météorologiques et géographiques.
Pour cela, la constitution d'un pôle public intégré de l'énergie est indispensable. Nous devons maîtriser toute la chaîne d'électricité d'un bout à l'autre. Il s'agit donc de planifier la sortie du nucléaire et le démantèlement des centrales. Donc il faut reprendre le contrôle des sites d'Alsthom rachetés par General Electric en France.
L'objectif 100% d'énergies renouvelables est indissociable d'une baisse globale de la consommation d'énergie et donc d'une recherche d'efficacité et de sobriété. Pour consommer moins d'énergie et améliorer la sobriété il faudra donc refaire l'isolation d'au moins 700 000 logements par an.
Pourquoi ?
Il existe de nombreux arguments en faveur de la sortie du nucléaire (en 2050) : dangerosité, prix, problème des transports, problèmes des déchets, etc.
Et d'abord, c'est une évidence, les centrales nucléaires ne peuvent pas fonctionner sans uranium. L'énergie nucléaire ne garantit donc pas la souveraineté de production de l'énergie.
Disons tout d'abord que L'uranium est une ressource non renouvelable (comme tous les métaux). Les réserves mondiales facilement accessibles sont en léger recul, mais il reste des réserves plus coûteusement accessibles pour 135 ans selon l'OCDE.
La France, elle, n'en dispose d'aucune. Toutes les mines françaises ont été fermées, soit qu'elles soient épuisées, soit qu'elles aient été jugées trop polluantes.
“Notre“ uranium vient donc de l'étranger et pour l'essentiel de 2 pays : le Niger et surtout le Kazakhstan. Or, dans aucun de ces deux pays, la situation politique, pour des raisons différentes, n'autorise un optimisme béat pour la pérennité de notre approvisionnement.
Danger + + +
Et oui, l'uranium est dangereux...
Il émet des particules radioactives. Ces particules ne semblent pas pouvoir pénétrer la peau humaine mais peuvent être inhalées ou ingérées. Il en résulte une exposition interne au rayonnement. Sa carcinogénicité (action favorisant le cancer) est indéniable.
Les concentrés uranifères (le “yellowcake“) présentent eux aussi une radioactivité importante du fait de leur forte teneur en uranium naturel. Selon les cas, l’activité massique de l’uranium 238 peut être de 7,4 à 9,5 millions de becquerels par kilogramme .
En fonction du temps écoulé depuis la fabrication du produit, le taux de régénération du thorium 234 et du protactinium 234m, et la présence de l’uranium 234, font que la radioactivité totale des concentrés uranifères peut être de 14 à 38 millions de becquerels par kilogramme alors que l’activité naturelle typique de l’écorce terrestre est de l’ordre du millier de Bq/kg (14000 à 38000 fois plus).
L’uranium et ses descendants émettent principalement des rayonnements alpha, bêta et gamma.
La dangerosité de ce minerai commence avec son extraction, continue avec son transport, explose avec ce que l'on nomme son enrichissement et ne s'achèvera pour une partie que quelques centaines de milliers d'années plus tard lorsque certains déchets seront redevenus inactifs.
Extraction du minerai d'uranium
Les méthodes employées pour extraire l’uranium sont les mines à ciel ouvert et les mines souterraines conventionnelles.
La concentration consiste à écraser le minerai jusqu’à ce qu’il ait la consistance du sable fin. Au moyen de lavages avec des acides et des alcalins, on isole l’uranium sous forme de concentré de minerai ou yellowcake “.
On désigne sous le nom de résidus de concentration les 80 % à 99,6 % du minerai qui restent.
En plus des produits chimiques utilisés dans les lavages, les résidus toxiques de la concentration contiennent des minerais sulfurés, du molybdène, du sélénium, de l’arsenic et du mercure, et il y reste environ 85% de la radioactivité du minerai original.
La contamination produite par les activités d’extraction de l’uranium persistera pendant des générations. La poussière emportée des sites par le vent ou les quantités abondantes d’eau utilisées pour contrôler la poussière et extraire l’uranium contiennent toutes des radio-isotopes à longue durée de vie, qui sont disséminés dans l’environnement. Dans les résidus, le thorium 230 se désintègre pour produire du radon. Avec une demi-vie de 76 000 ans, il produira ce gaz pendant des millénaires. Dans l’atmosphère, le radon se désintègre en polonium, en bismuth et en plomb, solides radioactifs qui pénètrent dans l’eau, les récoltes, les arbres, le sol et les animaux, y compris les humains.
L’extraction de l’uranium a des effets de vaste envergure en contaminant l’environnement avec de la poussière radioactive, du radon, des toxines contenues dans l’eau et des degrés accrus de rayonnement naturel.
Après l'extraction, il y a le transport.
Au Niger par exemple, ces transports se font d'abord par camion, depuis les mines du nord-ouest, à travers le Sahel, en empruntant des chemins de terre et de sable et sont réalisés dans des conditions de sûreté et de sécurité déplorables. Il n’est pas rare d’y croiser par exemple de simples voyageurs assis sur des fûts de concentrés uranifères (c'est le fameux yellowcake) et il y a souvent des accidents tout au long des 1600 km de pistes.
Par exemple, en février 2017, un camion transportant des containers de concentrés uranifères s’est renversé dans le village de Dassa-Zoumé au Bénin. Selon la presse locale, le véhicule accidenté n’a été relevé par une grue que 48 heures après l’accident. Or, les concentrés uranifères présentent une radioactivité importante du fait de la forte teneur en uranium naturel.
Le risque le plus important dans ce type d’accident est celui de la dissémination de matière radioactive dans le cas où le container serait éventré. Car, dans ce cas, il y a un risque de contamination interne par ingestion et inhalation de poussières radioactives.
Selon les informations officielles, les containers seraient cette fois restés étanches...
Ils rejoignent ensuite, (après parfois quelques km de train), le port de Lomé au Togo ou directement celui de Cotonou au Bénin (c'étaient jusqu'à une date récente deux ports appartenant à Bolloré). L’uranium est ensuite chargé dans des bateaux à destination de la France ou de l’Allemagne.
Après avoir contourné l'Afrique de l'Ouest et du Nord-ouest, arrivés à Fos sur Mer, au Havre, à Hambourg ou à Bremerhaven, il sont ensuite acheminés par train ou par route vers l’usine de Malvési près de Narbonne. On estime ces transports terrestres à 110 par an.
L'uranium en provenance du Kazhakhstan (la part la plus importante de nos importations de ce minerai), lui, doit d'abord traverser la Russie en train jusqu'à Saint-Petersbourg puis la mer Baltique en bateau pour rejoindre Hambourg avant d'être acheminé par train ou camion jusqu'à Malvési.
Les cargaisons d’uranium acheminées en France via l’Allemagne mettent en moyenne 4 jours pour arriver à l’usine de Malvési (2 jours en Allemagne - 2 jours en France) et empruntent l'axe Woippy (Metz), Dijon, Lyon, Miramas, Montpellier, Béziers, Narbonne et traversent les départements de Moselle, Meurthe-et-Moselle, Haute-Marne, Côte-d'Or, Saône-eet Loire (ou Ain, selon le trajet emprunté), Rhône, Drôme, Vaucluse, Bouches-du-Rhône, Gard, Hérault, Aude.
Après une deuxième série de manipulations, qui entraînent leur lot de pollutions et contaminations radioactives et chimiques, l’uranium, sous forme d’UF4 (tétrafluorure d'uranium), quitte l’usine de Malvési pour rejoindre l’usine de Pierrelatte (Drôme). Chaque jour, ce sont donc trois à cinq camions qui empruntent l’A9 et l’A7.
Enrichissement
Après Pierrelatte où l'UF4 est transformé en UF6 (Hexafluorure d'Uranium), une partie est expédiée hors de France, en Allemagne par exemple, le reste est enrichi. L’uranium enrichi part ensuite, d’abord par train, puis par camion, pour l’usine FBFC à Romans-sur-Isère qui fabrique des produits entrant dans la composition des combustibles nucléaires destinés aux réacteurs nucléaires : de la poudre de dioxyde d'uranium (UO2), des pastilles, des embouts, des crayons de combustible et des assemblages de combustible. 200 à 300 conteneurs chargés d’uranium enrichi traversent ainsi le département chaque année.
Une fois conditionné sous forme de barres (ou crayons), le combustible nucléaire est envoyé vers les 18 centrales nucléaires françaises et circule donc sur tout le territoire dans des camions spéciaux. Ces transports sont estimés à environ 300 par an.
Au total, chaque année, en France, ce serait ainsi 11000 transports qui seraient réalisés pour les besoins de l’industrie nucléaire civile par le train, par camion ou par bateau (soit une moyenne de 30 par jour), car il faut ajouter les trajets effectués par les déchets.
Entre les usines de combustibles, les 58 réacteurs et les centres de stockage ou d’entreposage, ces convois quotidiens tissent une toile radioactive qui n’épargne aucune région française.
Des centrales vieillissantes, une électricité de plus en plus chère !
Outre les problèmes d'un accident majeur toujours possible (cf Three miles Island, Tchernobyl ou Fukushima...) (et rappelons que la centrale du Blayais, par exemple serait menacée par une éventuelle montée des eaux de la Gironde et que toutes les centrales nécessitant beaucoup d'eau pour le refroidissement des réacteurs seraient menacées par une éventuelle sécheresse), il existe bien entendu un risque terroriste et ne parlons pas d'un conflit armé.
En 2014, Les autorités nucléaires n'ont-elles pas reconnu que des drones avaient survolé illégalement l'ensemble des installations nucléaires françaises «sans exception»? La présence de ces drones reste officiellement inexpliquée.
Les 18 centrales françaises sont d'autre part vieillissantes et devront bientôt être déclarées obsolètes. 5 réacteurs ont d'ailleurs été fermés récemment pour des problèmes semble-t-il structuraux de corrosion des circuits de refroidissement de secours. C'est par exemple le cas dans notre région à Civaux.
Le président de l'ASN (l'Autorité de Sûreté nucléaire) a alerté en évoquant les défis pour la filière, notamment si le choix de relancer la construction de nouveaux réacteurs, annoncé par le président Emmanuel Macron en novembre, était confirmé. «Si le nucléaire fait partie des choix faits pour assurer un mix énergétique décarboné et robuste à horizon 2050, la filière nucléaire devra mettre en place un véritable plan Marshall pour rendre industriellement soutenable cette perspective, et disposer des compétences lui permettant de faire face à l’ampleur des projets et à leur durée», a-t-il dit.
Le gendarme du nucléaire a aussi une nouvelle fois alerté sur l’urgence à trouver «des solutions concrètes et sûres de gestion des déchets».
Le “grand re-carénage“ nécessaire pour redonner une seconde vie à nos centrales nucléaires, évalué à 45 milliards d'euros par EDF, coûterait certainement beaucoup plus, probablement une centaine de milliards d'euros (rappelons qu'EDF n'est pas le roi des prévisionnistes en ce qui concerne les budgets : elle avait prévu en 2011 un coût de 3 milliards d'euros pour l'EPR de Flamanville, or, on en était déjà à plus de 19 milliards en 2021 !).
Ne vaudrait-il pas mieux consacrer ces sommes aux énergies renouvelables ?
Poser la question, n'est-ce pas y répondre ?
Le coût actuel du mégawatt d'origine nucléaire est en train de s'envoler autour de 50 € alors que le coût du MWh éolien et solaire est estimé entre 45 et 70€ en France, rendant a priori les renouvelables plus intéressantes que le nucléaire. Au point que le lobby pro-nucléaire n'a plus comme argument que la disponibilité de l'énergie nucléaire . Mais il est serait aussi possible de réguler les énergies renouvelables grâce aux barrages hydroélectriques par exemple ou à l'hydrolien en mer, etc.
Trois réacteurs nucléaires à l'arrêt pour des contrôles suite à des suspicions de corrosion
EDF a annoncé le 8 février l'arrêt prochain de trois réacteurs nucléaires supplémentaires pour effectuer des contrôles et vérifier si des problèmes de corrosion rencontrés ailleurs sur de...
08/02/2022
Le problème XXL des déchets et l'énorme inquiétude suscitée par le projet Cigeo de Bure
On n'en a pas fini encore avec les transports de matières dangereusement radioactives car il faut aussi compter sur le transport des déchets.
Toutes les centrales françaises possèdent une piscine où sont entreposés les combustibles usés en attendant de les expédier à l'usine de retraitement de La Hague. Ces piscines de stockage du combustible usagé sont donc des bassins d'entreposage provisoires de combustible nucléaire irradié ou destiné au rechargement d’un réacteur à l’arrêt. Ils constituent un danger en eux-mêmes (danger de fuites, dépendant souvent de la qualité du béton utilisé).
À la sortie du réacteur, le combustible nucléaire usé contient environ 96% de matières énergétiques à retraiter partiellement polluées par 4% d'actinides et de produits hautement dangereux et non réutilisables : les déchets HAVL(Haute Activité à Vie Longue). Ces derniers sont traités à La Hague et conditionnés par vitrification, en vue de leur entreposage en surface et éventuellement de leur stockage en couche géologique profonde.
Les déchets provenant de l'étranger (Russie, Allemagne, Japon...) sont — après un certain temps — réexpédiés aux clients étrangers qui ont obligation de les reprendre (obligation confirmée par la loi Bataille en 1991).
Le plutonium récupéré est transporté à Marcoule où il est utilisé pour fabriquer du combustible MOX. Le nitrate d'uranyle obtenu est quant à lui transformé en octa-ioxyde de triuranium (U308) à l'usine Orano de Pierrelatte en vue d'être enrichi pour être réutilisé dans de nouveaux assemblages de combustibles. Le terme MOX signifie “mélange d'oxyde (ou mixed oxides en anglais). Il se présente sous forme de poudre, granulés ou pastilles). Les opérations de séparation, purification, conditionnement et entreposage sont effectuées sur le site d’Orano de La Hague. .
Bure
Mais Orano (ex-Areva, ex Cogema), en retraitant le combustible usé des centrales d’EDF, génère des déchets qui concentrent la radioactivité.
Le site de Cigeo à Bure sera-t-il la solution pour les entreposer ? L'Andra souhaiterait l'ouvrir en 2030.
Ce site est censé accueillir les déchets dits de haute activité (HA) et de moyenne activité à vie longue (MA-VL) existants et à venir.
Car, actuellement, les déchets à haute activité issus de ces activités de retraitement (les plus dangereux) sont vitrifiés, coulés dans des colis d’inox et entreposés dans l’usine Orano de retraitement de la Hague, en Normandie, avec un système de ventilation pour réguler les températures extrêmement élevées liées à leur radioactivité.
Ceux de moyenne activité sont principalement entreposés à Marcoule et à Cadarache, dans le Sud de la France.
Les déchets que l’Andra voudrait enfouir à Bure, dans la Meuse, dans le cadre de Cigéo, représentent une petite part du volume total des déchets radioactifs : 0,2 % pour les déchets de haute activité et 3% pour ceux de moyenne activité à vie longue, mais ils concentrent au total près de 99,9 % de la radioactivité de l’ensemble des déchets radioactifs.
Il faut écouter (et tenir compte) des arguments de Greenpeace :
La concentration radioactive des déchets de haute activité est d’ailleurs telle que seules des machines peuvent manipuler ces conteneurs de déchets. Cacher nos déchets nucléaires serait-il une solution ? Ils resteront dangereux pendant des milliers d’années. Nous devons pouvoir les contrôler en permanence.
La question de la réversibilité n’est toujours pas résolue et ne le sera pas dans les faits. Il sera impossible de récupérer ces déchets si une solution durable était enfin trouvée par les générations futures. De nombreuses questions techniques restent aujourd’hui sans réponse (stabilité de la roche, risques d’incendie et d’inondation, signalisation du site…)
On ne doit pas laisser un tel fardeau aux générations futures avec les trop nombreuses inconnues que recèle ce projet. Il existe d’autres options pour gérer et surveiller les déchets nucléaires, telles que le stockage à sec en sub-surface.
Une autre inquiétude vient de ce qu'on ne peut pas prévoir comment réagira la couche d’argile. A Cigéo, les conteneurs hautement radioactifs seraient stockés en profondeur dans une couche géologique d’argile, sélectionnée pour sa relative stabilité. L’argile est notamment connue pour ses qualités en matière d’imperméabilité.
Cependant, les travaux de forage sont susceptibles de déstabiliser cette couche argileuse. De plus, des épisodes sismiques ne sont pas totalement exclus. La stabilité historique de la zone n’est pas une preuve suffisante, du moins complètement satisfaisante. Enfin nous savons que les conteneurs et les galeries ont tendance à se déformer sous l’effet de la haute radioactivité qu’ils contiennent et des mouvements de la roche.
Dans ces conditions, nul ne peut dire comment réagira la strate argileuse au cours des siècles à venir.
Il y a d'autre part des risques d’incendie, d’infiltrations et de dispersion de la radioactivité.
Le risque le plus grave est celui dʼincendie, compte tenu de la présence simultanée dʼhydrogène et de colis inflammables dans les alvéoles censées abriter les déchets de haute activité à vie longue. LʼIRSN, bras technique du gendarme du nucléaire l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), a démontré que cette faiblesse du stockage était réelle et quʼil existait un véritable risque dʼincendie dans les alvéoles de stockage. Un tel événement pourrait aussi aboutir au rejet de gaz radioactifs. La modélisation de lʼIRSN montre que la vague de chaleur provenant dʼun incendie survenu dans un colis pourrait se propager à un autre en quelques heures. Il serait impossible de reprendre une exploitation « normale » après un tel accident.
L’Andra a admis quʼ«une explosion pourrait entraîner une perte de confinement» du site de Cigéo et sʼaccompagner éventuellement de la dispersion de radionucléides dans le site de stockage.
Autre risque important : les infiltrations d’eau et les fuites radioactives. LʼASN a demandé à lʼAndra de faire la démonstration des mécanismes dʼécoulement de lʼeau dans la roche de Cigéo dans ses simulations. Il s’avère que les infiltrations dʼeau dans les couches géologiques seraient probablement les risques « techniques » et inévitables les plus importants à long terme. La présence d’eau dans la couche d’argile où est prévu le stockage entraînerait la corrosion des emballages de tous les types de déchets et conduirait à des fuites d’éléments radioactifs, parmi lesquels des éléments gazeux qui remonteraient à la surface.
Dans un avis public, l’ASN a souligné le manque d’analyse concernant la dégradation lié au vieillissement des composants, des conteneurs et des alvéoles de stockage. Leur robustesse et leur résistance à la corrosion ne sont pas clairement démontrées.
Ne sont pas non plus résolues les questions sur la saturation et les transports dangereux.
Le site de Cigéo est censé fonctionner pendant un siècle, avant d’être définitivement condamné. Sauf que les déchets de haute activité déjà produits jusqu’à présent et actuellement générés ne pourront ni être transportés ni stockés dans un lieu confiné avant 2075, tant leur radioactivité est élevée : elle nécessite un entreposage dans un endroit ventilé pendant plusieurs années.
Quand bien même le site de Cigéo à Bure serait ouvert à l’horizon 2030, il ne pourrait accueillir dans un premier temps que des déchets à radioactivité moyenne, en guise de test, les autres ne pouvant de toute façon pas supporter le transport et un stockage confiné. Pour l’instant les déchets hautement radioactifs sont traités et entreposés sur le site de la Hague dont le vieillissement est d'ores et déjà préoccupant. Que fera-t-on en 2030 des déchets hautement radioactifs stockés à la Hague dans des infrastructures à bout de course et au bord de la saturation, alors qu’ils ne pourront de toute façon pas être confinés dans les sous-sols de Bure avant plusieurs dizaines d’années ? Pour l’instant, aucune réponse.
Et que faire une fois que Cigéo parviendra à saturation, alors qu’il y aura encore de nombreux conteneurs à descendre si l’activité nucléaire du pays se maintient ? L’agrandir sans fin ? Question d’autant plus épineuse que les engagements pris par les pouvoirs publics et l’Andra ne prévoient aucune infrastructure en surface à Cigéo. On déplace donc le problème sans le résoudre, au risque d’en créer de nouveaux au passage.
En outre, plusieurs questions se posent quant à l’infrastructure logistique nécessaire pour assurer les milliers de transports de ces déchets extrêmement dangereux de l’usine de la Hague jusqu’à Cigéo, à Bure. Des questions pour l’instant non résolues.
Retirer un colis radioactif ne sera plus possible
A Cigéo, c’est la solution du stockage définitif qui a été choisie. Cela signifie qu’une fois les conteneurs enfouis les uns derrière les autres, les galeries creusées dans l’argile seront définitivement scellées par un mélange bétonneux, de sorte qu’elles ne soient plus jamais accessibles.
Dans d’autres pays, les conteneurs sont en général stockés dans des galeries accessibles à tout moment, ce qui permet d’opérer un travail de surveillance continue et d’intervenir en cas de besoin. Or à Cigéo, une fois le site scellé, toute intervention a posteriori serait de fait impossible.
Quant aux coûts, ils ne sont pas maîtrisés et sont imprévisibles à long terme.
Quand il s’agit de tels ordres de grandeur – plusieurs dizaines de milliards d’euros assumés par les contribuables – cela pose un certain nombre de questions politiques auxquelles nul n’est capable de donner des réponses satisfaisantes pour le moment.
Il s'agirait donc bien là d'un cadeau empoisonné aux générations futures !
Les déchets hautement radioactifs resteront dangereux pendant des centaines de milliers d’années encore. Ce que nous faisons aujourd’hui en matière nucléaire échappe en somme à notre contrôle et à notre implication historique.
Un jour ou l’autre, les êtres humains assisteront à la fermeture de Cigéo si ce projet est malgré tout mis en place. Pour autant, des déchets radioactifs inaccessibles et dangereux y resteront enfouis. Comment s’assurer que les générations futures, dans des dizaines ou des centaines d’années, ne tombent pas dessus par accident, ou selon des modalités dommageables voire tragiques ? Comment faire en sorte que les informations concernant le site de Cigéo et les déchets enfouis observent une continuité sur des milliers d’années ? Comment être sûr qu’elles soient encore lisibles et intelligibles, à la vitesse où vont le progrès technique et l’évolution des signaux communicationnels ? Comment garantir une continuité d’information ? Comment garantir une continuité politique ?
Aucun projet de stockage géologique n’est opérationnel, que ce soit celui de Cigéo à Bure, la désastreuse expérience d'Asse en Allemagne ou ceux à l’étude en Suède et en Finlande. Aucun n’apporte aujourd’hui des garanties suffisantes sur les plans de l’environnement, de la sûreté nucléaire, de la santé humaine et de la société. Des questions techniques majeures (notamment l’incapacité des conteneurs à résister à la corrosion et à éviter tout rejet de radioactivité dans l’environnement) restent sans réponse. Ces différents projets présentent tous des failles et dangers communs, aussi bien durant leur phase d’exploitation qu’à très long terme.
Les autorités comme EDF et l’ensemble de l’industrie électronucléaire tentent de passer en force sur Cigéo. Elles ont en effet besoin de nous faire croire qu’il existerait une solution au stockage des déchets radioactifs, d’abord pour maintenir la fiction du nucléaire comme une énergie soutenable, ensuite pour justifier son maintien en activité et sa part prépondérante (près de 80 %) dans le mix électrique français.
Or, aujourd’hui, il n’y a toujours pas de solution aux déchets nucléaires et ils continueront à s’accumuler tant que les centrales nucléaires fonctionneront.
Il n’y a en réalité aucune bonne solution pour gérer les déchets nucléaires pour le moment et la priorité doit être de limiter l’ampleur du problème en cessant d’en produire le plus tôt possible.
Le projet d’enfouissement des déchets de Cigéo n’apporte pas les garanties de stabilité et de réversibilité nécessaires. Et trop de questions de sûreté restent à ce jour sans réponse pour se précipiter vers cette fausse solution proposée par l’Andra. Il y a urgence pour cesser de produire ces déchets dangereux dès que possible, par une sortie planifiée du nucléaire.
Chaque année, en France, ce serait ainsi 11000 transports réalisés pour les besoins de l’industrie nucléaire civile par le train, par camion ou par bateau (soit une moyenne de 30 par jour). Entre les usines de combustibles, les 58 réacteurs et les centres de stockage ou d’entreposage, ces convois quotidiens tissent une toile radioactive qui n’épargne aucune région française.
Quels sont les risques réels pour La Hague ?
À La Hague, Des milliers de tonnes de combustible nucléaire usé sont actuellement stockés en attente de traitement, et ce stock est en augmentation constante, dont environ 10 000 tonnes de déchets hautement radioactifs répartis dans environ 17 000 containers, et 70 tonnes de plutonium.
Ces combustibles sont protégés par des gaines assemblées et tenues par des alvéoles métalliques, le tout placé sous quatre mètres d'eau dans des piscines recouvertes de toits semblables à ceux de hangars.
Selon un rapport de Wise-Paris publié peu après les attentats du 11 septembre 2001, un accident majeur, tel un crash d'avion de ligne sur une seule des piscines de refroidissement de la Hague pourrait conduire à un relâchement de césium soixante fois plus important que lors de la catastrophe de Tchernobyl.
Bien sûr, le site Orano la Hague est sécurisé, surveillé 24h/24h et dispose d’un plan de surveillance. Ce plan prend en compte la possibilité d’un survol du site. Chaque installation du site aurait été conçue pour résister à la chute accidentelle d’un petit aéronef. Le risque de chute d’un avion gros porteur a été analysé par les pouvoirs publics et réévalué. Le site de la Hague, point sensible national, placé sous surveillance des moyens de l’État (contrôle aérien, gendarmerie…) bénéficie aussi de moyens de protection, qui reposent en particulier sur une zone d’interdiction temporaire de survol de 1 000 mètres au-dessus du site, et par la possibilité d'abattre un avion civil gros porteur rempli de passager qui se dirigerait vers une installation nucléaire.
Les mesures de sécurité en place sur le site de la Hague seraient adaptées en permanence en fonction de l’évolution des menaces. Mais ces informations relatives à la sécurité du site et à sa protection sont couvertes par le secret de la défense nationale. Un secret fragile, convoité par d'innombrables organisations criminelles, qui ne permet d'évaluer ni les risques encourus par la population, ni de valider la pertinence des dispositions de sécurité couvertes par le secret.
Pour avoir un résumé de la position adoptée par la FI dans le débat sur l'énergie nucléaire, voir aussi le blog d'Éric Durand :