Après les grèves de décembre sur les sites Fountaine-Pajot de Port-Neuf et d’Aigrefeuille, c’est au tour du site pérignacien connu comme celui de Dufour, de passer à l’offensive pour revendiquer hausse de salaires et amélioration des conditions de travail. Les salariés, rappelons-le, avaient réussi à arracher une augmentation de salaire de 3% (Une misère, alors que la redistribution de dividendes aux actionnaires était de 3,8 millions d’euros en 2021, mais une victoire quand même).
Et voilà, à force de laisser macérer ses salariés dans une cocotte-minute infernale avec mauvaises conditions de travail, manque de prises en considération des souhaits d’amélioration de leur outil de travail, salaires très bas, l’explosion paroxysmique de la grève s’est produite ces jours-ci dans l’entreprise Dufour, qu’on devrait maintenant appeler Fountaine 1.
Elle a commencé le 15 février 2022. Mais en réalité, voici déjà plus d’un an que ça couvait. Des désaccords perpétuels , des tensions, des plaintes, préexistaient.
Depuis quatre ans que cette entreprise Dufour est passée aux mains de Fountaine-Pajot, dénonce un accastilleur, rien n’a été fait pour améliorer l’outil de travail. Les bâtiments étaient vétustes, ils le sont restés et aucun investissement n’a été réalisé, donc les trous dans le sol sont toujours là, etc.
Les conditions de travail elles, sont restées bien pourries, les salaires maigrichons, ne dépassant guère le SMIC -une honte (“avec 25 ans d’ancienneté j’en suis encore à 13€ de l’heure“). Et la direction actuelle ne voulait rien entendre pour améliorer la situation. Les bénéfices, par contre, sont au top, les carnets de commande sont bien gras malgré les difficultés d’approvisionnement (les accastillages, souvent en aluminium, viennent de Chine).
Alors, quand un énième accident du travail a été constaté l’autre jour au magasin (un employé a reçu une batterie pleine d’acide sur le pied), puis un énième +1 pour une histoire d’escabeau ayant remplacé le monte charge en panne, les 15 employés, comme un seul homme (ou une seule femme) se sont mis en grève. Ils ont aussitôt été suivis par les ouvriers des ateliers. Car le mouvement s’est élargi, depuis jeudi matin, à l’appel des syndicats CGT et CFTC notamment, à l’ensemble des secteurs de la production : chaînes de montage, menuiserie, maintenance, stratification polyester…Rapidement, plus de la moitié des 380 CDI ont adhéré au mot d’ordre de lutte des syndicats et depuis, un piquet de grève filtre les entrées de la boîte sous la surveillance d’un huissier de justice payé plein pot par l’entreprise pour vérifier qu’il n’y ait pas d’exaction.
Que répond la direction aux revendications des salariés ?
Comme d’habitude dans pareil cas, elle joue le pourrissement ! Elle ne jure que par les NOA, les Négociations Obligatoires Annuelles, mais qui, dans le cas de Dufour, ne sont pas prévues avant Mai !
Or les salariés réclament une augmentation de salaire immédiate et suffisamment conséquente pour faire face à l’augmentation des prix. La solidarité est à l’ordre du jour car beaucoup sont déjà dans des situations précaires. Quand tu gagnes peu, tu es vite dans le rouge et quand tu ne gagnes plus rien, c’est encore plus dur !
Une grève pour rien ?
Malgré le rapprochement par la direction de la date prévue pour les fameuses NOA, les salariés se sont pour le moment heurtés à une fin de non recevoir de leurs revendications salariales.
Néanmoins, une grève ce n'est jamais pour rien. Même si on ne gagne pas à tous les coups et même si c'est dur (les bas salaires sont toujours plus fragiles et résistent moins longtemps - quoi que ...- un rapport de force est établi, une conscience (de classe ?) se forge...
1 - Rapide historique des propriétaires de Dufour :
Les chantiers Dufour ont presque 60 ans (58), ayant été été créés en 1964 par l’ingénieur et navigateur Michel Dufour !
Ils ont été vendus ennemis 1976 à Marcel Bich et sont alors devenus Dufour and Sparks.
En 1988 , Dufour and Sparks a été racheté par Poncin. Le nouveau nom fut alors Dufour Yachts.
En 2000, Poncin céda Dufour à ses partenaires financiers.
En 2001, Cantiere Del Pardo (Chantiers du Pardo à Bologne) détient 47% du capital mais provoque la fermeture des sites de Montagne (Vendée) et de Marans.
En 2006, le contrôle de l’entreprise et pris par un fonds d’investissement, Rhône Capital.
L’année suivante, ce seront les groupes Anchorage Advisors (New-York) et Oaktree (gestion d’actifs basé à New-York) qui prennent les commandes.
2013 voit l’intervention de banques italiennes puis la prise de propriété de l’entreprise par JJL la société de Salvatore Serio.
Enfin, en 2018, l’entreprise est rachetée par Fountaine.
Et pourtant tout devait être fait pour ces bateaux de rêve ...