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Rue du Blogule Rouge Insoumis

Rue du Blogule Rouge Insoumis

Dans la rue du blogule rouge on s'intéresse à toutes les affaires de la cité et des citoyens.

Publié par rue du blogule rouge

À l'Assemblée nationale

 

François Ruffin écrit à François de Rugy, président de l'Assemblée, qui veut le faire passer en conseil de discipline pour avoir à l'Assemblée, porté symboliquement un maillot d'une équipe de foot amateur :

"L'Assemblée est nue ?" Lettre ouverte à François de Rugy

Monsieur le président,

Ce mercredi 20 décembre, en conseil de discipline, vous allez devoir trancher : faut-il me sanctionner pour le “déshonorant” et “indigne” port du maillot d'Eaucourt-sur-Somme dans l'hémicycle ?
Avant que cette grave question ne soit tranchée, et mon martyr achevé, je viens vous en poser une seconde : de quoi, au fond, le maillot d'Eaucourt-sur-Somme est-il le nom ?

Je ne voudrais pas vous parler de sport.
Ni même d'associations, ou de subventions.
Mais de notre Assemblée, de notre Constitution.

Notre histoire s'est offert des crises parlementaires. Il ne nous reste que des crises vestimentaires. En quelques mois, j'en ai connu trois : le non-port de cravate, la chemise hors du pantalon, et donc le maillot d'Eaucourt-sur-Somme. A chaque fois, l'hystérie m'a surpris, l'emportement de collègues députés, des médias, ou de l'institution.
Et puis, enfin, aujourd'hui, j'ai compris.

De la “loi travail numéro 2” à celle sur “la moralisation de la vie publique”, de la “Sécurité intérieure” au “budget de la sécurité sociale”, en un semestre déjà, il ne faut pas être bien malin pour s'en rendre compte : l'Assemblée, supposée “législative”, ne fait pas la loi.
Ces textes nous tombent de l'Elysée, après un passage par les ministères, et le Parlement sert de chambre d'enregistrement, gavé de lois comme des oies, siégeant du lundi au vendredi, jusqu'à une heure du matin. Nous suggérons certes des milliers d'amendements, pour se donner l'air important. Nous affichons notre fierté, victorieux quasiment, lorsqu'avec l'assentiment du gouvernement une virgule d'un alinéa est déplacée.
Je le savais depuis longtemps, en théorie. Je l'avais observé de loin, comme simple citoyen, sous Hollande, sous Sarkozy, sous Chirac. Mais c'est autre chose, tout de même, de l'avoir sous le nez au quotidien, d'y être en butte chaque matin. A découvrir, comme ça, la toute puissance de l'exécutif, qui est en fait également le législatif, je retiens un cri : “Montesquieu, reviens !”
J'en ai causé, déjà, avec des dizaines de personnes, des juristes et des lambdas, de la majorité et de l'opposition, des députés et des administrateurs, des de gauche et des de droite, et pour tous, pour tous, c'est une évidence : la séparation des pouvoirs n'est qu'une fiction.

Mais c'est une évidence qui se chuchote.
Une évidence qui se murmure.
Une évidence qui ne se clame pas haut et fort.
Tel le jeune enfant qui, dans le conte d'Andersen, Les Habits neufs de l'Empereur, vient crier “Le roi est nu ! Le roi est nu !”, je me suis assigné ce rôle : crier “L'Assemblée est nue ! L'Assemblée est nue !” Non par plaisir, mais par regret. Par espoir, aussi, pour qu'elle obtienne un véritable pouvoir, qui lui revient de droit : faire la loi.
Aussi, tous les débats d'aujourd'hui, sur le nombre de députés, sur leurs notes de frais, sur les réformes que vous avez lancées, tous ces débats ne m'intéressent pas, ou peu. Ces discussions masquent la seule interrogation qui vaille à mes yeux : à quoi sert-on vraiment ? Quelle fonction nous attribue-t-on ? Va-t-on faire la loi, oui ou non ?
Et sinon tant qu'à enlever deux cents députés tant qu'à faire des économies, pourquoi ne pas y aller carrément ? Pourquoi ne pas supprimer le Parlement tout entier ? Pour conserver une apparence de démocratie ?

Nous y voilà, l'apparence.
Et j'en arrive enfin au maillot d'Eaucourt-sur-Somme.

Avec mon cri, “l'Assemblée est nue ! L'Assemblée est nue !”, je me trompais, sans doute. C'est presque l'inverse qu'il faudrait dire : l'Assemblée n'est qu'habit. De pouvoir, elle n'en a pas, elle n'en a que l'apparat.
Comme beaucoup de nouveaux élus, j'ai fait visiter le Palais Bourbon à ma famille. Dans le salon Delacroix, mon fils Joseph, âgé de neuf ans, s'est planté le nez vers le plafond : “Tu as vu le beau lustre, Papa ?” Et j'ai songé, tu as raison, mon fils, c'est juste du lustre. Mais derrière ce lustre, derrière les dorures, derrière les apparences, le vide.
Derrière, l'insignifiance de notre pouvoir.
Derrière, l'inutilité de notre fonction.
D'où la panique, en fait, lorsqu'on touche à l'habit, qui fait le parlementaire.
C'est notre collègue Thierry Benoit qui a le mieux résumé ça. Dans l'hémicycle, durant mon intervention, durant mon hommage aux bénévoles, il s'égosillait : “Charlot en maillot !” Je l'ai retrouvé, mercredi dernier, à la Commission des affaires économiques, et j'ai éclaté de rire : “Bah alors ? Qu'est-ce qui t'a pris ? T'as pété un câble ?”, je l'ai taquiné. Et lui de me répondre : “Je t'aime bien tu sais, mais là, si on vient en maillot, quand est-ce qu'ils vont nous retirer la garde républicaine ? Quand est-ce qu'ils vont nous ôter les huissiers avec leurs chaînes ? Qu'est-ce qu'il va nous rester ?”
Qu'est-ce qu'il va nous rester, en effet, si on nous enlève les apparences ?

Aussi, Monsieur le président de l'Assemblée nationale, vous me sanctionnerez si vous le désirez.

Mais plutôt que de sauver les apparences, je vous inviterais à entamer un bras de fer avec un autre président, nettement plus puissant : de la République, lui. Pour que notre Assemblée soit habillée de réels pouvoirs. Pour qu'elle ne lui serve pas que de faire-valoir. Pour que les parlementaires ne soient plus ses marionnettes, moi comme Guignol, vous comme Gendarme…

Notre “dignité”, notre “honneur” de députés, devraient résider là : engager une lutte avec l'exécutif, pour la séparation des pouvoirs, pour leur rééquilibrage.
Vous pourriez compter sur mon plein et entier soutien.

Respectueusement comme il se doit

François Ruffin

 

DE NOTRE CONCEPTION DE LA DÉMOCRATIE

 

Le 13 novembre 2008 le compte-rendu officiel du conseil municipal de Périgny nous indique que le maire, Guy Denier, pour mieux esquiver le débat sur la gestion de l’eau proposé par Daniel Vince, s’exprimait ainsi :

 

« Je préfère la démocratie représentative qui est une des formes démocratiques la moins pire. La démocratie directe a ses avantages mais aussi beaucoup d’inconvénient [sic] …»

 

Rue du Blogule Rouge, on se pose encore la question : Qu’a-t-il donc voulu dire ? Qu’est-ce donc pour lui que « la démocratie représentative » qui serait « la moins pire » ?

 

Interrogeons-nous d’abord sur quelques définitions :

 

La démocratie représentative (la préférée du maire),  est un régime politique dans lequel on reconnaît à un organisme le droit de représenter une nation ou une communauté.

 

La volonté des citoyens s’y exprime par la médiation de représentants élus qui incarnent la volonté générale, votent la loi, et contrôlent éventuellement le gouvernement.

 

 Certains la considèrent d’ailleurs comme une forme d'aristocratie en ce sens où se sont les meilleurs selon les électeurs qui détiennent le pouvoir (avec aristocratie venant du grec aristokratia : aristos, excellent, le meilleur, le plus brave et kratos, pouvoir).

Une fois cette aristocratie en place par la volonté du peuple (les élections municipales, par exemple), elle a toute latitude pour prendre les décisions au nom de ce  peuple.

 

La démocratie représentative s’oppose à la démocratie directe dans laquelle le peuple prend lui-même les décisions. Elle est largement plus répandue que la démocratie directe : environ la moitié des habitants de la planète vivent sous un régime de démocratie représentative, dont ceux des États les plus riches et les plus puissants.

 

La démocratie directe est un régime politique dans lequel les citoyens exercent directement le pouvoir.

Appliquée au seul secteur économique, la démocratie directe est souvent appelée autogestion.

 

Les trois sources possibles de la démocratie directe sont :

 

  • l’histoire, qui donne des exemples de sociétés ou de groupes sociaux organisés en démocratie directe, tout particulièrement Athènes au VIe siècle avant J.-C.
  • la philosophie, certains philosophes, dont Jean-Jacques Rousseau, n'envisageant de démocratie que directe, fondant leurs réflexions en particulier sur les droits naturels des êtres humains et le pacte social qui les lie.
  • la politique, tout particulièrement une critique de la démocratie représentative montrant que ce système qui caractérise les États démocratiques modernes apparus depuis le XVIIIème siècle présente de nombreux défauts et qu'en réalité le peuple souverain y est dépossédé de son pouvoir. La démocratie directe apparaît alors comme une alternative aux systèmes existants.

 

De nombreux pays possèdent des mécanismes (référendum, assemblées locales, initiative populaire) qui relèvent de la démocratie directe ou semi-directe.

 

Dans l’histoire moderne et contemporaine, les seuls exemples de démocratie directe semblent être :

  • la Commune de Paris (1871)
  • les soviets de Russie (1905 et 1917 à 1921)
  • les conseils ouvriers en Allemagne et en Italie (1918-1920)
  • les communautés libertaires espagnoles (1936)
  • les conseils ouvriers hongrois (1956).
  • Une partie du Chiapas, au Mexique, contrôlé par l'EZLN (1er janvier 1994 - ?).

 

Mais à l’étude desquels Guy Denier se référait-il donc ?

 

 Quels griefs peut-il bien formuler à l’égard d’un type de démocratie dont se réclamèrent aussi  bien Jean-Jacques Rousseau que  Maximilien de Robespierre, Jean-François Varlet et le Marquis de Sade ? Et dont, ultérieurement, bien d'autres philosophes, tels Proudhon ou Kropotkine, se dirent également partisans.

 

D’autres formes se rapprochant de la démocratie directe existent aussi :

 

L’initiative populaire

 

Très proche de l'idéal d'implication directe du peuple dans les décisions politiques, l'initiative populaire est particulièrement développée en Suisse, en Californie et dans d'autres États américains.

Ce mécanisme permet aux citoyens de proposer des lois qui sont ensuite votées par l'ensemble des électeurs. Différents mécanismes permettent aussi de s'opposer à une loi par pétition ou de proposer un amendement de la constitution. En Suisse, les autorités fédérales peuvent en outre proposer un contre-projet et les électeurs peuvent choisir de voter pour l'un ou l'autre des projets ou pour ou contre les deux projets.

 

Parfois rattaché à l'idée de démocratie directe, le référendum existe dans de nombreux pays. [

 

Le rappel (contrôle citoyen)

 

Un autre mécanisme de démocratie directe est le rappel qui se pratique dans certains États américains.

Ce rappel (recall) permet à un nombre suffisant de citoyens de réclamer un référendum pour interrompre le mandat d'un élu ou d'un fonctionnaire. Un exemple particulièrement médiatisé est le rappel du gouverneur de Californie Gray Davis en 2003. Cette pratique se rapproche de la révocabilité.

 

Également liées à la démocratie directe, les assemblées sont indispensables pour débattre et prendre des décisions, en particulier au niveau local ou lors de mouvements sociaux.

 

De nombreuses régions du monde possèdent des assemblées locales où n'importe quel citoyen peut prendre une large part aux débats et aux décisions.

 

L’administration directe

 

L'un des exemples est la “Landsgemeinde“ qui existe, depuis le Moyen Âge, dans certains cantons suisses et subsiste aujourd'hui à Glaris et en Appenzell Rhodes-Intérieures. L'ensemble des citoyens sont appelés à se réunir en plein air une fois par an pour élire les magistrats chargés d'administrer le canton et de voter les lois. À Glaris chacun peut prendre la parole, poser une question ou proposer un amendement.

 

Parmi les exemples importants et récents de démocratie directe dans les mouvements sociaux, on peut citer :

  • le mouvement de mai 1968 en France
  • les assemblées ouvrières de 1969 et le mouvement autonome des années 1970 en Italie
  • la révolution iranienne de 1979.

 

Un système politique exclusivement fondé sur la démocratie directe est-il envisageable ?

 

Des organisations politiques telles qu'Alternative Libertaire ou médiatiques, telles que No Pasaran, défendent l'autogestion et la démocratie directe. Les théoriciens anarchistes (ou du moins que l'historiographie a bien voulu qualifier d'anarchistes) les plus récents (Hakim Bey, Michel Onfray, Gilles Deleuze) ont su montrer l'utilité des prises de pouvoirs temporaires et autonomes de petits groupes d'individus.

 

Et la démocratie participative ?

Enfin, il existe un autre concept : celui de la démocratie participative qui est un modèle politique alternatif. Il recouvre des concepts permettant d'accroître l'implication et la participation des citoyens dans le débat public et la prise de décisions politiques qui s'en suit.

Par rapport à la démocratie représentative (parfois désignée sous le nom de "démocratie délégative" et qualifiée “d'aristocratie élective"), la démocratie participative est un système mixte, dans lequel, selon l'une des acceptions du terme, le peuple délègue son pouvoir (des représentants sont donc chargés de proposer et voter des lois et des nominations) tout en le conservant (le peuple se saisit lui-même directement de telles questions, via une pétition d'une fraction du corps électoral ou d'une interactivité sous forme de débats de proximité).

 

En ce qui nous concerne, les fondements et les moyens de la démocratie participative nous semblent devoir être :

  • Un droit étendu et fréquent de vote, qui permet de fournir directement l'initiative législative aux citoyens (voir le système suisse de la démocratie directe)
  • La concertation, qui se traduit par des débats libres traitant tant les décisions à une échelle locale que celles ayant un impact national. Cette concertation fonctionne sur la base d'une triangulation comprenant : 1) les élus, 2) les experts, 3) les citoyens.
  • Un système organisé et des dispositifs d'actions et de débats collectifs, multiples et construits offrant à tous les participants toutes les idées constructives (et nouvelles) des habitants la possibilité de s'exprimer "à égalité de parole et de dignité", de proposer des actions et de les mettre en œuvre collectivement. L'ensemble des idées issues des débats sont tracées (enregistrement audio, vidéo, écrit) et diffusées a minima à tous les participants.
  • La participation des citoyens à la décision et à l'action.

 

Pour que toutes les mesures soient acceptables, dans la mesure du possible, par la grande majorité des personnes concernées et dans le sens du "bien commun", il faut que l'implication du citoyen, dans le débat ou la controverse qui précède la prise de décision politique, se réalise effectivement à plusieurs niveaux et dans plusieurs cadres.

Les moyens technologiques apportés et développés actuellement peuvent permettre d'appliquer ces principes, par exemple via Internet.

Conclusion

L'absence d'un tel système provoque souvent l'échec des expériences, par découragement des citoyens et des élus. Elle ne permet ni l’implication des citoyens dans les affaires qui les concernent, ni le contrôle nécessaire des décisions et des décisionnaires. C’est vrai au niveau national et a fortiori au niveau local.

L’absence d’un tel système est donc bien le principal reproche que l’on peut faire à notre démocratie car la démocratie représentative, chère au maire de Périgny, « a peut-être ses avantages mais aussi beaucoup d’inconvénients ». N’est-ce pas finalement la pire ?

Rue du Blogule Rouge, on préfère finalement l’autogestion et la démocratie participative la plus directe possible à la démocratie représentative.

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